Alaïa / Grès. Au-delà de la mode
Alaïa / Grès. Au-delà de la mode ph. Stéphane Aït Ouarab
Silencieuse et secrète, déterminée jusqu’à la réclusion d’une vie tout entière passée à l’atelier, Madame Grès (1903-1993) se voulait sculptrice. Tout à son œuvre concentré, avec l’obstination des maîtres infatigables, se refusant aux excès médiatiques de sa profession, Azzedine Alaïa (1935-2017) avait de même étudié la sculpture à l’école des Beaux-Arts de Tunis. Cette ambition partagée ne fut pas corrompue par les métiers de la couture auxquels ils se consacrèrent avec tant de singularité et de succès. Elle vint magnifier au contraire l’exercice du drapé pour l’une, celle de la coupe pour le second au point de les situer comme les fils à plomb de l’histoire de la mode.
Si rien ne peut attester que les deux couturiers se sont croisés, leurs créations se sont rencontrées à n’en point douter. Apôtres d’une certaine forme de dépouillement, les créations de Grès ou d’Alaïa, d’une apparente simplicité dissimulent une complexité extrême parfois de coupe et de conception. Guidés par le tissu qui gouverne leurs dessins et leurs choix, recueillis des semaines durant dans la décision d’un volume de robe à couper, assurés dans l’élection des couleurs monochromes, du noir intense et du blanc plâtre favoris, les deux couturiers ont épousé une communauté de création et d’esprit.
Les drapés que Grès avait érigés en art total depuis les années 1930 s’incarnent dans les robes longues, fluides et plissées d’Alaïa. Le jersey adoubé par la première se traduit en maille et en matériaux souples chez le second. L’exigence des proportions, la rigueur de la coupe qu’il s’agisse de modèles pour le soir ou pour le jour les unit.
« Dès que l’on a trouvé quelque chose de caractère personnel et unique, avouait Madame Grès, il faut l’exploiter à fond et en poursuivre la réalisation sans s’arrêter et jusqu’au bout ». À cela, Alaïa répondait des années plus tard : « Lorsqu’une idée s’impose à soi, il faut s’en saisir au lasso, tourner autour et ne pas en déroger ».
Pour la première fois une exposition inédite associe les œuvres de Madame Grès et celles de Alaïa. Fédérées selon leur principe formel, leurs recherches de coupe, les accords de tissus ou de couleurs qu’elles embrassent communément, les robes du soir ou de jour des deux couturiers convient le visiteur à une leçon au-delà des modes. Intemporelles pour l’une, hors du temps pour l’autre, les créations exposées au nombre de 60 restituent le dialogue de Grès et Alaïa, deux obstinés solitaires devenus sculpteurs de robes.
Alaïa / Grès. Au-delà de la mode ph. Stéphane Aït Ouarab
Madame Grès, de son vrai nom Germaine Krebs, a commencé à travailler dans les années 1930. En 1933, rue de Miromesnil à Paris, elle s’associa à Julie Barton pour ouvrir la maison Alix Barton qui devint Maison Alix en 1934, rue du Faubourg-Saint-Honoré. Elle remporte rapidement un vif succès grâce à ses modèles qui évoquent la statuaire antique et qui selon sa propre technique du drapé s’adaptent parfaitement à la vie moderne. À la suite de différends avec ses associés, Germaine Krebs fonda en 1942 la maison Grès, anagramme du prénom de son mari Serge. Elle installa les salons blancs de sa maison et ses ateliers 1, rue de la Paix, au cœur même de Paris. Insensible aux engouements et aux effets de mode des décennies, Madame Grès présente ici même jusqu’en 1987 ses collections hors du temps. Parmi ses clientes célèbres comptent Greta Garbo, Marlene Dietrich, Maria Casares, Delphine Seyrig ou Grace Kelly.
Azzedine Alaïa, couturier franco-tunisien, a réalisé une œuvre exceptionnelle dans le domaine de la mode qui lui vaut d’être considéré comme l’un des plus talentueux créateurs de sa génération.
À son arrivée à Paris en 1956, Azzedine Alaïa exerce son métier de couturier pour une clientèle privée. Il est particulièrement influencé par l’élégance intemporelle de certaines d’entre elles comme Louise de Vilmorin, Arletty, Simone Zehrfuss, Cécile de Rothschild, Greta Garbo.
Il présente sa première collection de prêt-à-porter en 1982. Il sera toujours au plus près des femmes dont certaines seront ses muses, comme Grace Jones, Tina Turner. Il contribuera à lancer la carrière de plusieurs mannequins comme Naomi Campbell, Farida Khelfa, Stephanie Seymour, Tatjana Patitz, Cindy Crawford, Veronica Webb…
Alaïa figure parmi les derniers couturiers à maîtriser toutes les étapes de la conception et de la réalisation d’un vêtement. Maître de la coupe, digne héritier des maîtres de la Couture il est aussi un grand collectionneur ayant acquis plus de 15 000 pièces, témoins des créations de l’histoire de la mode au XIXe et XXe siècle. Parmi elles 700 robes de Madame Grès figurent à l’inventaire de ce patrimoine aujourd’hui propriété de la fondation qu’il souhaitait de ses vœux. Une sélection de modèles et de photographies sont pour la première fois présentées dans les espaces d’exposition.
Alaïa / Grès. Au-delà de la mode - vidéo Stéphane Aït Ouarab
Alaïa / Grès. Au-delà de la mode ph. Stéphane Aït Ouarab
Alaïa / Grès. Au-delà de la mode ph. Sylvie Delpech
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VISITES COMMENTÉES DE L' EXPOSITION
La Fondation propose des visites guidées de l’exposition en cours au 18 rue de la Verrerie en partenariat avec l’agence de médiation culturelle Des Mots et des Arts qui organise les visites commentées avec un guide conférencier spécialisé en histoire de la mode. Elles offrent aux visiteurs un aperçu sur l’exposition en cours ainsi que sur la vie et l’œuvre d’Azzedine Alaïa, l’histoire du lieu et son architecture.
Alaïa / Grès. Au-delà de la mode ph. Stéphane Aït Ouarab
Jusqu’au 21 janvier 2024, Azzedine Alaïa est de nouveau mis en lumière au Palais Galliera à travers une exposition qui présente, pour la première fois, sa collection patrimoniale exceptionnelle qu’il a réunie au fil du temps.
Partenariat tarifaire :
Les visiteurs munis d’un billet de la Fondation Azzedine Alaïa, bénéficieront d’un tarif réduit au Palais Galliera, d’un montant de 13€.
Les visiteurs munis d’un billet du Palais Galliera, bénéficieront également d’un tarif réduit à la Fondation Azzedine Alaïa, d’un montant de 7€.
Palais Galliera, musée de la Mode de Paris, 10 Avenue Pierre 1er de Serbie, 75016 Paris